Acheter une imprimante 3D en 2015 ne sert à rien !

Vous voulez faire des économies ? Alors suivez mon conseil : n’achetez pas une imprimante 3D à Auchan si vous n’êtes pas un féru de technologies, ni un geek. Encore moins si votre qualité première n’est pas la patience, puisque qu’une impression 3D peut vous demander plusieurs heures avant de prendre vie… !

L’impression 3D est un sujet marrant et passionnant. Certains économistes présentent cette technologie comme une révolution, capable des promesses les plus folles. Mais derrière ces fantasmes, quel est le véritable potentiel de l’impression 3D ?

Tout n’est pas possible en impression 3D

De mes nombreuses conférences et de mes différents salons, j’ai surtout tiré de nombreuses anecdotes (et du chiffre d’affaires ;-). Les promesses véhiculées par les médias n’ont fait qu’alimenter des croyances, au point que les gens s’imaginent tout et n’importe quoi. Je me souviens notamment d’une conférence tenue à Valenciennes fin 2013 où je présentais mon imprimante 3D alimentaire capable d’imprimer en 3D du chocolat. Une femme m’avait déclaré ce jour-là que « elle est géniale votre machine, car grâce à vous on va combattre la faim dans le monde » !… Alors, rétablissons quelques vérités :

  • Non, une imprimante 3D ne fabrique pas de la matière
  • Non, une imprimante 3D ne crée pas des molécules de chocolat en partant du vide :)
  • Oui, une imprimante 3D utilise une « cartouche » de matière, à l’état liquide, poudreux ou solide, pour lui donner une forme. C’est tout !

Ce qui est nouveau (ou presque) avec l’impression 3D, c’est la méthode de fabrication digitale : en restant derrière son ordinateur, on donne vie à un objet. De quoi ravir les digital natives !

Combattons les légendes urbaines

Je ne compte plus les médias qui nous racontent qu’on va pouvoir imprimer en 3D un mug ou des couverts à domicile. Vous avez déjà acheté un mug ou une théière en plastique vous ?

  • « L’impression 3D permet de réparer des pièces. »
    Vrai, mais… J’ai souvent entendu des remarques du genre : « On a vu à la télé qu’on pouvait réparer des choses chez soi avec une imprimante 3D ». C’est vrai que si vous avez l’énergie de passer 10 heures à modéliser votre embout de rideau de douche, puis de l’imprimer 3D, de vous rendre compte que la fiabilité de l’impression n’est pas au rendez-vous, de ré-imprimer encore parce que vous vous êtes trompé dans la taille, puis de le limer car l’objet sera moche et rainuré… vous aurez vite fait d’aller chez Ikéa acheter la pièce à 1,99€. Vous gagnerez du temps, de l’argent, et en plus ça vous fera sortir prendre l’air !
  • « L’impression 3D combat l’obsolescence programmée. »
    Vrai et Faux
    . L’obsolescence programmée, pour peu qu’elle existe, touche à toutes les technologies. Une machine à laver la vaisselle qui tombe en panne, ce n’est pas uniquement dû à un mécanisme fissuré. C’est peut-être un problème électronique ou informatique. Comment réparer une telle chose avec imprimante 3D à domicile ? Impossible !
  • « L’impression 3D c’est bon pour l’environnement »
    Vrai et Faux. L’impression 3D utilise de la matière pour fabriquer un objet, le plus souvent de manière « additive ». C’est à dire qu’elle ajoute de la matière de manière successive couche par couche pour concevoir un objet. Il y a donc moins de déchet de matière qu’en fabriquant selon un procédé « soustractif ». Certaines matières sont très chimiques, intégrant des solvants puissants. Mais le problème est aussi ailleurs : le temps d’impression 3D est très énergivore : plusieurs heures pour concevoir des petites pièces, ça fait beaucoup de kW-h ! Et c’est sans mentionner les finitions post-impression, qui n’ont pas non plus des vertus environnementales reconnues (utilisation d’acétone, de vernis, etc.).
  • « L’impression 3D, ce n’est pas cher ! »
    Faux. Un peu comme les machines permettant de fabriquer du pain à domicile : en calculant le coût total d’acquisition du produit TCO vous vous rendrez compte qu’un objet du quotidien peut revenir une fortune : le coût de la machine, des bobines de plastique, la consommation énergétique, et le temps passé… ça fait beaucoup ! Seule la notion de plaisir et de fierté, que de fabriquer son objet soi-même, vous convaincra du contraire.
  • « L’impression 3D va permettre de créer des emplois. »
    Vrai et Faux. Difficile de dire qu’aucun emploi ne sera créé grâce à l’impression 3D. Par contre, ce dont je suis sûr, c’est que les projets de Fablab initiés par mon ex-ministre de tutelle Fleur Pellerin sont des projets que je qualifierai de « Bisounours morts-nés » : associatifs, ils ne génèrent pas de revenus suffisants, et ne répondent à aucuns besoins primaires inassouvis. Une entreprise comme Leroy-Merlin a tout compris : elle intègre le modèle des Fablab dans son business-plan. Autant vous dire que les Fablab indépendants vont avoir du mal à se confronter à la force de frappe d’un Leroy-Merlin !
  • « L’impression 3D va limiter la désindustrialisation de notre territoire. »
    Faux. Ce n’est pas parce Barack Obama a dit que l’impression 3D permettrait de relocaliser des emplois que c’est vrai ! Preuve en est : mes confrères d’iMaterialise ont déjà déplacé une partie de leur usine en Chine, là où les coûts humains sont moins élevés. Car une imprimante 3D ne fait pas tout de manière autonome : il faut la paramétrer, sortir les objets du bac d’impression, leur appliquer une post-finition… toute cette maintenance a un coût non négligeable. Par conséquent, je ne crois absolument pas à un possible backsourcing.

Tant qu’on continuera à faire des crottbjets avec les imprimantes 3D à domicile, inutile d’investir corps et âmes dans cette technologie !

Faisons le deuil de la révolution grand public

Ce n’est moi qui l’annonce, mais Eric Carreel dans La Tribune, avec qui je suis (pour une fois) d’accord. Mais j’irais plus loin : avec la montée en puissance de l’économie collaborative, on est davantage dans l’utilisation que dans l’appartenance. Résultat : posséder une imprimante 3D à domicile me semble une dépense excessive, alors qu’il existe de nombreux services professionnels online qui permettent d’utiliser de nombreuses imprimantes 3D professionnelles, sans les posséder ! En plus, vous pourrez ainsi concevoir des objets dans de nombreuses autres matières : céramique, métal, résine, cire, métaux précieux, porcelaine etc. Allez, un peu de publicité pour mes confrères : jetez un œil à Sculptéo ;)

Vous tenez absolument à acheter une imprimante 3D après avoir lu cet article ? Si c’est un achat réfléchi, dirigez-vous alors sur le comparateur d’imprimantes 3D mis en place par mes amis de LesImprimantes3d.fr. Et prévenez votre banquier ;-)

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1 réponse

  1. 3 décembre 2015

    […] Cet expert en impression 3D l’explique très bien : une imprimante 3D ne sert pas à grand-chose, là, tout de suite, maintenant. Mais dans un cadre professionnel, elle peut produire des objets vraiment étonnants. […]

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